anthropocène / callovien supérieur

il marche en solitaire, il se promène en dilettante depuis quelques dizaines d’année, pas même l’épaisseur du trait à l’échelle des temps géologiques, il marche en laissant les pensées venir et s’évanouir, polir les anicroches de la vie quotidienne, illuminer certains moments, le laissant en paix quand la fatigue commence à se faire sentir, il marche avec l’espoir de voir ce qu’il n’a pas encore vu, l’espoir dérisoire de voir ce qu’il pourra fixer dans la mémoire de son appareil photographique,

il flâne en repensant aux dernières découvertes qu’il a faites à travers ses lectures, sur Mars la vitesse du son est différente selon qu’il s’agit de fréquences aiguës ou graves au point que la conversation serait rendue impossible, il marche en marchant dans sa tête sur le sable d’espaces aperçus lors d’un voyage vers le précambrien, ou sur une planète de la galaxie du Tourbillon qu’il a tout loisir d’imaginer, jusqu’à ce qu’il glisse sur une crotte de chien, il voyage en solitaire en sifflotant la chanson de Gérard Manset, il marche avec l’envie de s’asseoir sur un banc, un banc introuvable,

il se traîne à grand-peine vers un but qu’il a fini par oublier, il éprouve une vague nausée devant le spectacle devenu ennuyeux des bords du chemin, il cherche à tromper l’ennui en recherchant l’une des découvertes qui lui en avaient bouché un coin, une découverte qui sans doute a été rejetée dans un coin reculé de son cerveau avant d’être poussée inconsciemment dans la poubelle mémorielle, il commence à avoir soif quand il est trop loin du dernier bistrot resté derrière lui, il a mal au bout d’un gros orteil, il s’en veut d’avoir été trop enragé dans sa volonté de s’éloigner de sa base arrière, il entend au loin les aboiements d’un chien, un chien qu’il imagine enragé, un molosse qui lui foutra la trouille au moment de le croiser, un molosse qui le fera transpirer et respirer à grands traits, une espèce de démon qui ressemble aux démons qui l’obsédaient au moment de s’ébrouer, lui qui n’est qu’un chien qui divague en solitaire,

Auteur : Francis J

Écrivain photographe ou photographe écrivain

4 réflexions sur « anthropocène / callovien supérieur »

  1. What you describe here is the city as a palimpsest, as a superimposition of contradictory memories, as a collision of epochs, of worlds and times. The poetry of tiny things, but also the thriller of last things. Walking means capturing small bumps, pushing open doors to new worlds, capturing stories without words, gathering the secrets of undefined terrain. It means seeing a picture puzzle in a simple staircase, a poem in a window frame, in other words, bringing out myths of place in every moment. Yours are rather gloomy and eschatological at the moment.

    An expressive text.

    Uwe

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